Les étrangers sont partout


ou

l’écrivain faisant de la lèche à la langue est lui même étranger à sa fiction — n’est ni franqué ni troncho ni frizailleur ni mortroll ni neutrino ni lepteuton et pas même mortrait — d’attente sur la frontière, dites leur de ne pas faire comme nous et d’inventer — les tronchodes sont bonnes — ouais j’y ai goûté — c’est comme ça, c’est écrit dans le dictionnaire — c’est bien fait pour les malins — lex est quod notamus — cotiseur ergo loquatur — Berthe Damneke qui colporte ça dans — c’est de la merde — des futureureux — pour Losting jéné réchion — possédé par la glande-gidouille — with his worn out shoes? — hier matin à Lascow — débile — débile — dé — la Géniale Dysenterie — imprimé sur papier riet

(extraits)

(au centre aujourd’hui)

-Tu as vu ce type qui s’est immolada devant le Pôle Emploi ?
-Ouais — torcho et brûlo — c’était un mortrait qui avait un travail dans sa région le Mortrou — près de Brûlon
-Chez moi toute la famille est au chômage en ce moment — à table on parle de permort tous les jours alors ça ne m’étonne pas ce qu’il s’est passé -Merde vous parlez de permort en famille ? Le serf chasse le serf — pauvre contre pauvre c’est la ligoudille de ce pays — abonnnés à l’abonminer-nation
-Ouais — même si j’ai pas bien compris qui habitait dans ce pays si ce n’est mes voisins qui viennent bouzifailler du bigorneau de temps en temps avec moi à la maison

(dans l’enveloppe du mort)

Chère famille, chers voisins,
Je vous aime, seulement je veux que le pourvoiment publicon sache que nous sommes tous en train de souffrir. Mes derniers mots seront : Nous devons urgemment redéfinir notre Humanilité, il y a danger

(dans le cottage village des cotiseurs)

-Tu as entendu parlé du cotiseur ergo loquatur — je cotise donc j’ai le droit de parler
-Ah non pas du tout — moi je ne travaille pas et je parle — mais dis m’en plus
-Quelqu’un me parle ? — ora et labora ! — mort aux oiseaux — mort aux oisifs ! — On va tous vous contributer, vous les assistés ! Délaissons les adlésés ! Ces acherges à piquer !
-Eh ! Oh ! Je suis là moi ! — Allo !
-Quelqu’un me parle ? — Il a disparu
-Mais non je suis là ! — Je suis là ! Eh dis je te parle !
Le rapporteur pour les Éditions Réinsérer dit ensuite : Des personnes disparaissent chaque jour dans les villages. L’origine de cette disparition semble être une nouvelle maladie : le cotiseur ergo loquatur C’est la raison pour laquelle je vous fait part de ce rapport.

(sur le pont)

Eh dites je vous connais vous ! — d’Avignon ? — vous êtes d’Avignon ! — Les magiciens d’Avignon !
-Pas d’Avignon nous — pas nous prendre pour des concons ni ronchons car à babord on gueule on gueule mais à Avignon on gueule plus très fort — festoche fastoche pour bourgeois fastueux — tour de magie — HOP — Avignon disparaît de ce monde — trou à mignon — HOP — Avignon réapparaît et devient une marque de bière dans ce monde
-Buvons une Avignon ensemble pour fêter ça — décontenançons cette bouteille — vidons là ! — et continuons de décontenancer le reste du monde !

(dans la bibliothèque A-tentative)

-Pourquoi cite-t-il tant — les Scythes ?
-Il est amoureux — Il dit « seule la vie amoureuse restera »

(coucou, salut, ça va?)

-CC
-Lu
-CV ?
-La forme — toujours la forme — putain de style
Le rapporteur pour les Éditions Réinsérer dit ensuite :
-Les tronchos sont fort en prolo-parlotte mais que faire s’ils abandonnent les autres — le sentiment cosmicon — s’ils enfantent un marmonde sans l’attacher aux peuplades aux forêts de peupliers ou à la prolo-parlotte, le marmonde s’en ira tourner en rond dans la salle de jeu et se délitera par concrétion faute d’avoir été ancré.

(dans un vide comblé d’amour)

-Il me manque un truc dans ma vie
-La poésie sûrement
-Quoi? Trukudon que dis-tu donc?
-Il te manque la poésie car partout où le manque ? sera poésie ! s’il te manque de la guinouillette dans le frigo c’est qu’il te manque un pot de poésie dans le placard — un poète à payer sur le tard
-Et le manque de lien politique?
-Manque de poésie
-Et s’il manque du travail?
-Travaille la poésie
-Et le manque de joie chaque jour, le manque de l’être aimé?
-Manque de poésie et chaque poète mort nous manquera
-Tu me manques
-Moi aussi je t’aime


1979, une guerre éclate dans la ville de Pouet-Loulé entre les pro-John-Deer, les Pro-Ford et les Pro-Renault mais ce sont les Cosnards, mafia possédant la barrière électrique extensible qui ont gagné à la suite de cette victoire — en 1984 aménagement sur le site de Coulans-sur-Gée — L’entreprise prend une dimension industrielle — paysans sans terre — contrôle des terres de la région — Je salis votre nom Cosnetard !

Au marché Place des jacobins — sur un stand de poteries on vend des décontenants — Il y en a de toutes les tailles — décontenant à vie — décontenant à mots — décontenant à ennemis — décontenant à pisse pour incontinents — décontenants décorés

Dans l’histoire de l’art de Gombrich — sur la carte des lieux cités à la fin — il ne se passe rien dans l’ouest de la France — un désert culturel — soit-disant — Quelle Folie ! Et la Charnie ?!

La ministre frizailleur Jenny Bonidé à changé l’appellation du RSA (Revenu de Solidarité Active) qui devient le RDH (Revenu de Dignité Humaine). Il n’est plus le revenu de celui qui reçoit de la part de ceux qui veulent bien le laisser vivre, mais bien le revenu de celui qui peut jeter à la figure de ceux qui le regarde noir son existence. Ainsi on ne regardera plus ce revenu comme dépense pour des existences lourdes à porter mais bien comme un dernier rempart de l’humanisme à entretenir



La Génialogie de la Ligoudille
Étude du mythe fondateur de Max Bellastung
mémoire-mémorable d’un étudiant en génialogie

Les fictions moquent avec légèreté ce qui est pris pour du réel, dans la langue même,elles décontenancent les gredins-guedins.
Max Bellastung

Max Bellastung fut le premier juge de la ligoudille. Il portait une robe-couverture-de-chambre bailbrun, d’alezan, de gris pommellé, de poil de rat, de cerf, de rouen, de vache, de zencle, de pecile, de pye, de leuce. Il fut enfermé chez lui par ses fils pour ne plus aller juger. Max Bellastung dormait toute la journée sur un lit à son nom, si bien qu’il était parfois confondu avec ce meuble de chambre. Il usait de la confusion pour prendre l’apparence de fumée de fumier et laisser le lit le représenter devant la famille. Les fils disaient «Bonjour père Bellastung» à l’oreiller, le lendemain, on donnait la soupe verte à la couverture. Max Bellastung devint juge car il n’était né ni franqué, ni troncho, ni frizailleurs, ni mortroll, pas même mortrait ce qui était caution de son impartialité. Il était né jeté-là sous forme de quelques pellauderies que feust l’enfant, fondement qui escappoit de sa mère. A partir de là, son père s’exclama « t’es pas fini mon fils », et Max Bellastung cru toute son enfance qu’il était donc infini. Très jeune, il lut Le traité du désespotoir de Kiki Le Garde et il perdit toute idée de ce qu’il pouvait bien être, seul l’habit de soi, l’apparat en soie, nu de soi, nul en soi, dépourvu d’intériorité, l’habit faisait le bonhomme. Il deviendra alors ce qu’il pense des autres : juge. Max Bellastung jugea en premier un écrivain, Louise Fernande Stephanie, pour anti-trollisme et anti-ahurisme. Louise Fernande Stephanie est une nanti qui fut installé par les éditions Galliyénamarre. Le dossier fut difficile pour Max Bellastung car d’un côté les livres-heretico-ça-envoie-du-pâté plaisait à Max Bellastung, mais il était manifestement devant une demeurée, une bouffeuse de haricots, une simplette guinouillette tronchode. Il se reconnu en cet écrivain fini et cette infinie-conne. Il la condamna au coupe-ongle de la ligoudille et au gourdin à gourdes. Après cela, tout le monde reconnu sa qualité de juge. Les fils de Max Bellastung l’ont enfermé pour savoir qui était vraiment leur père. Les fils de Max Bellastung pensaient que la ligoudille était une addiction pour leur père donc il lui firent subir une cure de désengage. La réalité c’est que la ligoudille s’était confondue toute entière avec cet homme et que sans le pouvoir de juger, il ne pouvait plus qu’être de la fumée de fumier ou un lit. Tout vaporeux qu’était Max Bellastung, il commença à s’envoler, devint omnipotent et pu juger tout le monde au même moment, des trains à vapeur, des vipères et des guêpes, des mordus du crédit. Douze merdeux sans prédisposition, jouant les apônautres ont dormi sur le lit du nom de Max Bellastung, écrasés de douze rêves et d’une douzaine d’oeufs cassés, se perdirent de ligoudille pour écrire chacun un livre de malade : Bubule, Bille, Blâme, Balbutie, Drible, Balade, Bile, Bide, Bleute, Blême, Bam et Bondiou. Livres proscrivant la préposition « dans » ; Seuls livres encore autorisés dans les bibliothèques mortrolls et interdits dans les universités franqués, c’est ce qu’on dit.

Le Bibliobus des Éditions Réinsérer
(décentralisation et ennui)


L’Autorité (il est à la fois flic, juge et président) — Alors pourquoi avez-vous brûlé toutes les voitures du quartier ?
Le Gamin (il a à la fois 8, 12, 15, 20 et 29 ans) — On se faisait chier.
L’Autorité — Moi je pense que c’est dans tes gènes, c’est inscrit dans votre sale race.
Le Gamin — C’est vous qui avez inventé ça, j’ai vu vos enfants jeter des pétards sur des handicapés qui passaient, dans votre campagne, c’est du même ordre. Et votre fils aîné qui ne dépasse pas le mètre carré de son lit, situation d’insecte, c’est du même ordre.
L’Autorité — Ça n’a rien à voir, fais pas le malin c’est toujours vous.
Le Gamin — Parce qu’aucun de nous ne s’amuse monsieur.
L’Autorité — Pourquoi vous-êtes vous arrêté à ce quartier ? Vous aviez assez de temps pour faire toute la ville comme vous ne branlez rien de vos journées.
Le Gamin — Parce que c’est devenu vite chiant aussi, on se lasse, au fur et à mesure ça se désenchante. J’allume le feu sur la première bagnole, puis je laisse les prochaines à mes potes, une fois qu’on a tous passé notre tour, on se fait chier.
L’Autorité — Situation de crevés !
Le Gamin — On a pas brûlé le bus magique par contre.
L’Autorité — Le ? Le quoi ?
Le Gamin — Le Bibliobus des Éditions Réinsérer, nos grands-pères qui se font chier depuis qu’ils sont à la retraite passent leur temps dans ce bus. Respect des anciens on n’en brûle rien. Vous n’avez pas vu le bus magique ?
L’Autorité — Encore des histoires de gamins.
Le Gamin — Vous ne pouvez donc pas le voir. Sûrement car vous cherchez profondément toute raison, sûrement car vous croyez que les motivations sont cachées. Le bus magique, seul ceux qui ont confiance en la puissance de l’apparence peuvent le voir, tous ceux qui trouvent toute raison dans l’apparent peuvent voir le Bibliobus car il est tellement flagrant.
L’Autorité — Mais que se passent-t-il dans votre cerveau ? Quand les scientifiques pourront expliquer cette délinquance dans vos synapses, tout sera réglé !
Le Gamin — N’allez pas si loin. Ne cherchez pas aussi profondément. Regardez, regardez dans ce parc, vous voyez le bac à sable ? Le gamin qui fait son château de sable là ; il se fait chier. Je vous envie, vous avez réussi à vous convaincre que vous êtes occupés. Je vous envie car de ce point de vu vous interprétez toute chose comme motivée. Mais les moteurs sont cramés, nos têtes sont cramés, nous jouons aux jeux vidéos avec des champions complètement cramés et OP, on lit nos BD dans lesquelles les dessins sont tellement fumés qu’on n’aspire plus qu’à ça, devenir auteur de BD, faire des images, de jolies images, d’inquiétantes images, de sales images, éviter autant qu’on le peut la profondeur. Le fond, ça nous fait peur maintenant. On garde la vignette narrative, histoire de se la raconter entre potes, on vous laisse les secrets mystères pour vos prêtres, policiers et papa, papes, pompiers et pompidou.
L’Autorité — Bon j’en ai assez de ces conneries. Je vais vous enregistrer dans le fichier. Ton nom et celui de ton pote.
Le Gamin — Quick et Flupke.


La Géniale Dysenterie

T’es tout petit — t’es tout petit — et ya pas d’arbre chez toi — t’as pas de jardin — t’as pas de plante — et tu dois marcher une heure pour aller à Lidl — oui il y a des Lidl en Allemagne — oui Lidl c’est allemand — alors tu marches — et quand tu marches — il y a des arbres — alors quand tu marches tu possèdes tous les arbres — pense à payer le loyer un jour — fais pas semblant de ne pas comprendre la facture — les chiffres — c’est international Tiens si je m’achetais une plante à Bauhaus? — ou un petit arbre? — un Noyer! — j’adore les noix — mais je ne sais pas si un petit noyer — un noyaux — ça fait des noix — ou alors j’achète des noix au super-marché — mais alors il faut marcher — pouah — boyaux — un cageot — mieux — chercher s’il y a un marché — comme ça je pourrais marcher et acheter! — et je rentre à l’appartement après — sac de noix — bière — où ils parlent allemand — où je comprends rien — à mon bouquin — ah ouais tiens si j’écrivais un bouquin! — un truc malsein! — quand je m’arrêterais de marcher — je commence l’histoire — un père qui va niquer ses enfants — des petits nuciculteurs — putain — on va me détester après ça — putain c’est fort — putain c’est drôle ce mot — nuciculteur — un bouquin — une vraie merde qui dégouline — amoureusement — je vais écrire un livre — un livre de merde — un livre génial — le mien:

LA GÉNIALE DYSENTERIE

Jocelyn Gasnier
Revue Pli, numéro 01, 2013

Pli n°1
Écrit
Jocelyn Gasnier