DÉBRIS
Je fais mine et rate. Le dessin, la phrase, la voix, l’art.
Il me plait de rater, au cas où la chose tiendrait.
Les arbres se décollaient encore-un-peu, du sol
– On lisait les oiseaux, sauvages, ils en étaient
– Il n’y avait pas, dans ses yeux, le reflet de la pousse
(Le sol et ses yeux se décollaient)
Il n’y avait que les sommets silencieux
ces ombres lointaines – êtres immenses –
Ses mains se décomposaient au claquement des secondes
– Le temps lourd sur le dos, le temps tyran sur le dos – , que le retrait.
Littéral, après accident – dans le style – du constat. Attentant. / L’autre
jetait son écuelle pour recevoir l’eau à même les mains. / La marchandise pressée,
le renouvellement de sa perte. / Onze pinceaux secs et maculés de noir
me servent d’horizon. / Le dos se courbe et la voix se terre. / L’organe
se plie à beau fixe, chaque jour, nous cherchons. / On a beau lire,
rien ne semble éclairer. / Le long du boulevard, juste avant le pont. / On a
beau dire qu’on s’y fait, le dos se serre et les os se terrent.
Comme on creuse.
Le dorbe se terroix.
Commona faireaux. Orgapli chaquand jourchons.
Pinçonsec et macunoir: servanzon.
Carnage !
Toudéréchi gesteste sulra.
Onna lireau. Eclairemble et deminatôtour.
Voicèdent suivoù chapent au lonlard. Justant lépon.
Onnat tourbeauron
toupenchan tournevid.
« …Quand tout dors dans la nature, j’évoquerai le génie de la Révolution.
Et docile à ma voix, il descendra des régions où les astres s’embrasent,
il se tiendra debout à mon chevet, et à sa droite, armé d’une épée flamboyante,
dissipera devant moi les ténèbres de l’avenir. »
E. Coeurderoy
« Ce n’était pas une émeute de boutiquiers ; c’était une révolte d’anges
rebelles qui, depuis, ne se relevèrent plus. Tout ce que le prolétariat de
Paris renfermait d’invisible énergie et de poésie sublime tomba dans ces
jours néfastes, étouffé par la réaction bourgeoise, comme le froment par
l’herbe stérile. »
Jours d’exil, 1854
E. Coeurderoy
« Toutes les pluies du monde n’ajouteront point un millimètre (de hauteur) à une montagne ;
mais les pluies peu importantes peuvent lui enlever par la cime des mètres et des mètres de hauteur. »
« Ils sont anarchistes mais ils veulent bien entrer dans les gros mariages d’argent, dans les gros mariages bourgeois,
dans les gros mariages des dynasties universitaires, dans les gros mariages de défense républicaine. Et ils ont fait de la Sorbonne une pépinière de gendres. »
C. Peguy
« L’artiste « est une contradiction vivante.
Il est sorti des conditions fondamentales de la vie ; ses organes ne supportent plus sa pensée » »
Melmoth, l’homme errant, Maturin ,
cité dans L’homme sans contenu de G.Agamben
« Nous étions contre le pouvoir des mots, contre le pouvoir »
G.J.Wolman

« Les citations dans mes œuvres sont comme des voleurs aux aguets sur la route,
qui attaquent avec leurs armes le passant et l’allègent de ses convictions »
W.Benjamin
« L’artiste est l’homme sans contenu, qui n’a d’autre identité qu’une émergence perpétuelle au dessus du néant de l’expression,
ni d’autre consistance que cette incompréhensible station en-deçà de soi-même. »
« L’essence du nihilisme coïncide avec l’essence de l’art au point extrême de son destin en ce que chez tous deux l’être se destine à l’homme comme Néant.
Et tant que le nihilisme gouvernera secrètement le cours de l’histoire de l’Occident, l’art ne sortira pas de son interminable crépuscule. »
L’homme sans contenu, G.Agamben,
chap 6 ; Un néant qui s’anéantit lui même
La poïétique a pour objet l’étude des potentialités inscrites dans une situation donnée qui débouche sur une création nouvelle.
« Partout la naissance attention le jour déjà le hasard dévore la terre
riche encore l’écrit retourne au principe de solitude la colère du corps
l’écrit sépare le souffle de la lettre l’écriture égare la vivacité à dire le
détachement de l’homme cesse au nom du lieu la raison illumine un
arrêt sur le mot oppose le perceptible à une absence il n’y a pas de fumée
la main porte le feu et le livre (8 octobre 1994) »
Les inhumations, Peinture dépeinte.
G.J. Wolman
« D’autre part, je tiens à informer mes lecteurs que je recevrai avec plaisir tout ce qu’ils trouveront bon de m’envoyer :
pots de confiture, mandats, liqueurs, timbres-poste de tous les pays, etc.
En tout cas chaque cadeau me fera rire. »
Maintenant nº 4, mars-avril 1914.
A.Cravan

Justin Delareux
Revue Pli, numéro 02, 2014